Autour d'une scène de théâtre, il y a d'un côté les acteurs, pantins à la personnalité bien trempée mais fixe et prévisible, suivant à la lettre un scénario qui leur est imposé. De l'autre se trouve les spectateurs, venant faire mine d'observer cette petite troupe d'un œil attentif, pour se divertir, apprendre des choses et en particulier se retrouver soi-même. Johan fait partie de la deuxième catégorie dans le grand théâtre de la vie. Il juge, appréhende et analyse les comportements des gens qui l'entourent, distant et résolu à ne pas monter à son tour sur l'estrade. Sa solitude est le résultat de son incapacité à savoir comment réagir face aux autres : il n'est pas timide, il n'est juste pas particulièrement sociable. Son humour froid et sarcastique le fait souvent passer pour un garçon calculateur qu'il n'est pas. En réalité, il est uniquement tourné vers la logique et laisse très peu ses sentiments s'exprimer et on pourrait donc déceler dans ses yeux bleus glacés un semblant de cynisme imaginaire. Johan est cultivé, il aime apprendre, lire, se renseigner, tout savoir, et d'ailleurs il a la fâcheuse tendance à penser qu'il a toujours raison. Ce défaut bien agaçant le pousse à prendre parti dans des affaires qui ne le concerne pas forcément. Sa curiosité est immense, il est prêt à poser des questions ou à essayer de comprendre dans n'importe quelle situation, bien heuresement il est compréhensif et neutre et ce qui est bien, c'est qu'il ne risque pas de défendre quelqu'un juste parce qu'il l'aime bien. Il est complètement pour la justice. Sinon, il est du genre passionné et ne démord pas quand il est sur un sujet. Dans ces moments là, il est prêt à tout pour aller au bout de sa recherche.
Son orgueil le pousse souvent à préférer le statut des autres, à les jalouser ou à se sentir supérieur dans la grande majorité des cas. Son expression favorite serait "on n'est jamais mieux servi que par soi-même." Il n'a absolument pas confiance en la capacité des autres. Pourtant, il s'attache bien vite et n'aime pas partager ses amis. Ceux-ci sont d'ailleurs peu nombreux, mais il leur sera très fidèle.
Niveau physique, Johan est un garçon de taille moyenne (1m71), à la carrure simple et pas particulièrement impressionnante. Ses oreilles d'elfes pointues dépassent de sa chevelure blonde épaisse et courte, qui parait souvent négligée (et ce n'est pas toujours une impression). Ses yeux sont d'un bleu-gris perçant, aux lueurs glacées et aux reflets rêveurs. Son visage fin aux traits encore enfantins est la plupart du temps fermé, ne laissant transparaitre aucune émotion apparente. Et pourtant, malgré toutes ses envies de se cacher derrière ce visage, ses joues rosissent facilement et son regard est fuyant dans les situations difficiles, et il a beaucoup de mal à le contrôler. Il porte un pull bleu foncé aux manches retroussées, un pantalon noir, d'où est attachée une ceinture en cuir. Par dessus tout ceci, il porte une cape rouge foncée avec une large capuche. Ses bottes sont solides et brunes foncées. Son sac en bandoulière lui permet de transporter un livre poussiéreux sur les mathématiques et l'astronomie qui le passionne -du moins beaucoup en ce moment-, en livre sur les plantes et légumes comestibles trouvés dans la nature, un couteau entouré d'une bande de cuir pour en protéger la lame, quelques provisions, un carnet abîmé, un crayon noir, une bourse avec son argent, une gourde, et des pièces de monnaies tombées au fond du sac.

Si un jour l'envie vous prend de fouiller dans le sac en bandoulière de Johan, vous tomberez nez-à-nez avec un carnet abîmé dont je faisais mention tout à l'heure... Si ce carnet est particulièrement bien rempli et possède une allure si étrange, c'est que Johann le transporte depuis bien longtemps déjà, depuis qu'il est petit garçon... Voilà quelques extraits :) (il ne notait jamais les dates...)

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Cher journal,
Avec Elienne, tout à l'heure, on a quitté la maison après les corvées et on a été en forêt! C'était vraiment génial! J'espère que Maman ne découvrira rien. Mais si Elienne ne dit rien, il n'y pas de raison. Quand j'étais petit, Papa nous avait montré comment fabriquer un arc. Je ne m'en souvenais plus très bien, heureusement qu'Elienne était là et qu'elle m'a réexpliquée. C'est vraiment la meilleure des grandes sœurs! J'ai cherché du bois souple et j'en ai trouvé tellement qu'on aurait pu fabriquer des arcs pour tout un régiment. Le problème, c'est qu'au moment où je rejoignait la clairière pour ramener la pile, j'ai entendit des bruits dans les broussailles et des voix d'hommes. J'ai courut rejoindre Eli, et on a dû tout abandonner et courir. Maman nous avait parler des braconniers, et ce n'était pas le moment de sa faire attraper. On a courut aussi vite qu'on a pu et on s'est cachés dans la grange. On a bien rigolé! Eli m'a promis qu'on y retournerait bientôt, et ensuite on a continué de jouer. En tout cas une chose est sûre, si on retourne dans la clairière, on aura plein de bois souples.
Johan.

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Salut!
Demain c'est mon anniversaire! Je vais avoir 11 ans! Eli m'a dit qu'elle m'avait préparé une surprise! J'ai tellement hâte d'y être! Finalement, on est jamais retourné en forêt parce qu'on a plein de travail à la ferme en ce moment. Papa vient de partir à la ville pour livrer les dernières cultures de maïs. Maman n'est pas très en forme à cause de la naissance de notre petit frère à Eli et à moi : il s'appelle Elen. On un peu rit avec Eli, parce qu'Elen, c'est un nom de fille, non? Après ça, Maman nous a chassés de sa chambre et nous a interdit de revoir le bébé. Ce n'est pas comme si il nous intéressait vraiment. A part que quand il sera grand, on aura moins de travail à la ferme parce qu'il pourra faire des choses, lui aussi, enfin j'espère. Je n'ai même plus beaucoup de temps pour écrire, à part les soirs avant de dormir. Mais Eli m'oblige toujours à éteindre la bougie parce qu'elle n'arrive pas à dormir. D'ailleurs je l'entends déjà se plaindre... C'est peut-être parce qu'elle n'a pas pu apprendre à écrire? Quand elle était petite, Maman m'a dit qu'ils n'avaient pas eu assez d'argent pour l'emmener à l'école, et que moi j'ai eu plus de chance parce que je suis né le deuxième et qu'a la ferme, on faisait plus de rentabilité. Je ne sais pas trop ce que ça veut dire, mais en tout cas, ce qui est bien, c'est que suis sûr qu'Eli ne pourra jamais lire ce qu'il y a écrit dans mon journal! Pauvre Eli... Bon, je vais dormir!
Johan.

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Cher journal, aujourd'hui c'était mon anniversaire! C'était vraaaaiiiiment génial! Eli m'a emmené en ville avec l'autorisation de Maman et on a été au cirque. On s'est vraiment bien amusé! J'ai l'impression d'avoir eu 11 ans avec elle, aujourd'hui. Mais en vrai, Eli a déjà 16 ans. Elle n'est pas très grande, mais son visage est plus mature. J'espère qu'elle va m'attendre avant de devenir adulte. Je ne pourrais jamais tout raconter de ce qu'on a fait aujourd'hui, mais jamais je n'oublierais ça! Elienne, c'est vraiment la meilleure. Quand on est sorti du cirque, je lui ai demandé ce que je me posais depuis déjà pas mal de temps.
"Dis, Eli, tu aimerais savoir lire?
-Je ne sais pas, elle a répondu. Je crois que je suis heureuse comme ça.
-Vraiment? Tu es l'aînée donc plus tard tu récupéreras la ferme de Papa et Maman?"
Elle e haussé les épaules, et a fait la moue. Je n'ai pas réussi à comprendre ce qu'elle avait voulu dire par là mais je n'ai pas osé poser plus de questions. Elle a attaché ses longs cheveux couleur de bronze en nattes et on est rentrés à la maison sans plus de détails.


De nombreuses pages plus loin...
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Cher journal.
Aujourd'hui, un garçon est venu à la maison, c'était un voyageur. Il doit avoir un peu près 20 ans, un an de plus que ma sœur. Que dire de lui? Il est grand, bien habillé, les cheveux marron et les yeux pétillants, et surtout des oreilles fines, arrondies et cachées derrière ses mèches bien soignées. Un humain. Je me suis assis tout en haut des escaliers et j'ai observé l'homme parler à Maman, qui s'occupait d'Elen dans la cuisine tout en tenant une discussion avec l'homme. Tout ce que j'ai compris, c'est qu'il était en plein voyage, qu'il devait livrer un message important à je-ne-sais-qui et qu'il avait besoin d'un endroit ou loger pendant 3 ou 4 jours, avec un autre garçon qui avait l'air juste un peu plus jeune. Maman accepta avec enthousiasme et me sermonna d'aller m'occuper des chevaux des deux hommes. J'y suis donc aller, un peu renfrogné : ces gens de la ville me semblait bien trop hautains pour être honnêtes. Pourtant, vu leur accoutrement et leur façon de parler, ce n'était ni des brigands ni des des voleurs de grands chemins qui viennent parfois loger chez les gens. En tout cas, j'aurais aimer en parler avec Eli, mais elle est partie au marché avec Papa pour aller vendre des récoltes et ils ne rentreront que demain. Pendant tout le reste de la journée, j'ai du écouter les histoires de cet homme, nommé apparemment Peter. Il me conta ses soit-disant exploits, ses aventures et ses péripéties. L'autre garçon passait son temps à boire les paroles de son maîtres et à obéir à tous ses ordres sans poser de questions. Ce qui m'énerva, c'est que ce monsieur Peter me prit aussi pour son esclave et ne cessait de me faire des remarques. Malheureusement, selon les conseils de Maman, j'étais bien obligé de lui obéir. Je me suis couché très tard parce Monsieur voulait que je brosse et nettoie entièrement son cheval... J'espère vraiment qu'il partira vite.

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Cher journal...
Cette journée fut à nouveau un enfer. Déjà, Elen a pleuré toute la journée. Peter n'a pas arrêté de lui hurler dessus à cause de ça, ce qui ne faisait qu'empirer l'humeur de mon petit frère. Maman était débordée et n'arrêtait pas de me crier dessus aussi, malgré tous les efforts que je faisais pour subvenir aux désirs de l'inconnu et aider à la ferme.
Mais le pire fut quand Eli et Papa sont rentrés à la maison.
Peter s'est soudainement montré très gentil, il parlait affaire avec Papa et tous les deux se sont très bien entendus. Mais surtout, il adorait Eli. Il adorait ma sœur. Il n'a arrêté d'essayer de la courtiser, et en plus, ça semblait marcher. Je pense qu'Eli ne va tomber dans son piège, mais je ne suis pas très rassuré. Quand j'ai commencé à me plaindre de lui, Eli m'a dit que j'exagérais et elle s'est moqué de moi... ça ne me dis rien qui vaille. Non, rien du tout... Surtout que l'inconnue est de plus en plus odieux avec moi. Je recommence à en avoir vraiment marre de tout ça. Dans quelques semaines, j'aurais 14 ans. Quand est-ce qu'on me prendra enfin pour un adulte? A commencer par Eli qui me traites toujours comme son petit frère dont elle doit s'occuper? J'en ai vraiment assez de tout ça.

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Bonjour bonjour cher journal...
Voilà déjà une semaine que Peter est là. Rien ne s'est améliorer. C'est même devenu encore pire qu'avant. Maman est parti en ville pour commencer les inscriptions de Elen à l'école qui va sur ses quatre ans, et de lui trouver une nourrice là-bas. Je sais que les affaires marchent bien, mais c'est peut-être un peu tôt pour dépenser l'argent comme ça. Surtout que maintenant qu'ils sont partis, je n'ai plus de soutien à la maison. Eli m'a trahi. Quand j'ai été dans la grange tout à l'heure, j'ai entendu des rires, et j'y ai surpris Eli et Peter en train de s'embrasser. Plus rien ne sera plus jamais pareil. Je ne vois plus l'intérêt de rester une seconde de plus dans cette ferme. Le départ de Peter et son espèce d'esclave est prévu demain, et un sentiment sourd qui me tord le ventre me fait pressentir qu'Eli va partir avec eux. J'ai tellement mal que j'ai l'impression que ma vie n'a plus aucun goût. Je me remémore encore ces jours heureux quand on était plus jeunes, à se moquer du prénom d'Elen, à fuir de la ferme après les corvées, à se cacher dans la grange, à se battre en se lançant du foin, à rire, à rire ensemble toute la journée comme des complices de toujours. J'étais persuadé qu'un pacte secret nous liait, tous les deux, mais c'était faux et uniquement à sens unique. Je n'ai pas osé lui en parler. Elle aurait sûrement dit que j'exagérais. Exagérer quoi? Je n'ai jamais aimer partager. C'est parce que j'ai rarement eu quelque chose à moi tout seul auquel ma raccrocher. Et la seule chose qui me restait vient de m'être arraché par un homme aux oreilles rondes, au sourire hautain et au discours vantard.

[...]

On ne peut pas mieux résumer l'enfance de Johan qu'en piochant dans ses propres phrases. Après le départ de sa sœur Elienne, il resta trois ans à la ferme de ses parents, économisa de l'argent et s'enfuit un matin sur les routes pour prendre sa vie en main, décider de son destin. Il n'a jamais revu sa sœur, mais secrètement, au fond de son cœur, il espère la croiser au détour d'un chemin. Revoir son sourire une dernière fois, qu'il lui soit adressé ou non.